Questions Photo

Tourner en vidéo HD avec les reflex Canon

Le milieu cinématographique est unanime

L’apparition au cours de l‘été 2008 des premiers reflex disposant d’un mode vidéo HD a créé un tel cataclysme qu’il est difficile de comprendre comment l’usage mixte photo-vidéo des appareils compacts grand public s’est démocratisé dans le plus grand silence. Pour autant, le mode vidéo proposé sur les reflex de la gamme pro n’a rien de comparable avec celui destiné au grand public, puisqu’il s’adresse désormais aux professionnels. Face aux réticences de certains d’entre eux, et pour éliminer tout complexe lié aux caractéristiques de ces “simples” appareils photo, il reste préférable de consulter l’avis éclairé des spécialistes de cette nouvelle industrie pour se faire son propre jugement.

Au début des années 1980, la conception de la prise de vues consistait pour la plupart des réalisateurs cinéma à disposer d’une caméra très mobile qui pouvait s’adapter à toutes les positions imaginables. La plus légère de toutes fut la Aaton 8/35. Ce prototype fut construit en 1979 par Jean-Pierre Beauviala pour Jean-Luc Godard, qui souhaitait donner plus de liberté à son écriture cinématographique. Elle avait été appelée “8-35” parce que c‘était une 35 mm qui avait la taille d’une Super-8.

Au même titre que cette caméra hybride conçue par un réalisateur de la Nouvelle vague, les reflex EOS, même 30 ans plus tard, sont toujours l’un des meilleurs outils caméra des indépendants. La technologie HDSLR est effectivement à l’origine d’une nouvelle étape esthétique et créative, d’une nouvelle écriture qui semble répondre aux attentes de la majorité des utilisateurs.

Néanmoins, il serait inexact de cantonner le cataclysme EOS au seul secteur indépendant. Par l’intermédiaire des réalisateurs et des chefs opérateurs qui ont très vite testé et adopté ce procédé, l’industrie du cinéma professionnel profite aujourd’hui largement des bénéfices de cette technologie très économique. Les récentes possibilités de fixer des objectifs zooms cinéma grâce à la disponibilité sur le marché de bague EOS en monture PL (monture réservée aux optiques cinéma, voir le chapitre 5) ne fait qu’augmenter le potentiel des reflex face aux choix matériel des productions cinématographiques. L’intérêt confirmé de certains protagonistes célèbres pour ce procédé a contribué à crédibiliser l’utilisation professionnelle de ces boîtiers, dont le prix ne dépasse pas celui de certains consommables sur les grosses productions.

  • En France plusieurs réalisateurs (Claude Lelouche, Cédric Klapisch, Jean-Jacques Annaud, Quentin Dupieux) ont déjà réalisé certaines scènes de leurs longs métrages en utilisant simultanément plusieurs boîtiers EOS.
  • Les célèbres directeurs de la photo, Darius Khondji (Seven), Rodney Charters 24 h Chrono), ont utilisé à plusieurs reprises des boîtiers 5D MkII adaptés et préparés par Panavision sur des productions publicitaires. En février 2010, le réalisateur Robert Rodriguez a également tourné un clip avec deux boîtiers EOS 7D qu’il souhaitait tester.
  • Le médiatique Jon Fauer (réalisateur, directeur photo, auteur à succès) fait régulièrement référence au procédé EOS dans son fameux journal Film and Digital Times. Il a notamment testé récemment la série de zooms Optimo de la société Angénieux sur les EOS 1D MkIV et 7D.

Pour analyser l’origine et l‘évolution du bouleversement technologique qui s’opère, sept acteurs et spécialistes de l’industrie cinématographique ont accepté de témoigner sur leurs diverses expériences EOS. Ils évoquent à leurs manières les raisons qui ont séduit et conduit l’ensemble des protagonistes du secteur cinéma à s’intéresser au mode vidéo des reflex EOS.

 

Georges Campana, producteur de Breakout Films

En septembre 2009, j’ai eu l’occasion de présenter le potentiel du mode vidéo du 5D MkII au producteur de Breakout Films, Georges Campana Il cherchait à l‘époque une configuration de tournage souple et moderne pour réaliser un téléfilm de fiction “historique” pour France Télévisions. Voici son témoignage (30/09/2009).

Avec l’avènement du numérique, pas un mois de l’année sans qu’une nouvelle caméra, un nouveau format HD ne se profile à l’horizon : anticiper à un terme de plus de six mois un tournage et ses équipements de prise de vues devient aujourd’hui un casse-tête nécessitant la boule de cristal d’une voyante pour être résolu… Et puis j’ai eu l’occasion de découvrir grâce au directeur de la photographie Éric Brancherie et au réalisateur Sébastien Devaud le Canon EOS 5D MkII : ce fut un choc. Car tout d’un coup il m’a semblé qu’on changeait d’univers, tant par les normes de résolution que par l’ ergonomie de l‘équipement. Ayant à produire pour France 2 un téléfilm de fiction “historique”, je recherchais un moyen de donner à la narration une forme et une modernité qui repoussait les traditionnelles approches stylistiques du film d‘époque… On a tous en tête les défis de Kubrick lorsqu’il réalisa “Barry Lindon”… Nous avons donc décidé de faire des essais, principalement focalisés sur la sensibilité et la résolution de l’appareil : en utilisant des sources nouvelles (LED), nous avons progressivement réduit l’intensité lumineuse jusqu‘à n‘éclairer un visage qu’avec une bougie, en calant la sensibilité de l’appareil sur 800 ISO pour voir quel type de bruit pouvait résulter d’un tel challenge. Et là surprise ! La qualité HD de l’image était époustouflante.

Fort de ces essais, mon idée était donc de tourner ce téléfilm dans des normes HD requises par la chaîne en bénéficiant de l’extrême légèreté de l‘équipement de prise de vues fournie par le Canon… Nos objectifs sont donc:

  • de bénéficier d’une sensibilité exceptionnelle pour tourner avec des sources naturelles,
  • de multiplier les appareils EOS dans des scènes de cascades pour avoir des points de vues souvent compliqués à mettre en œuvre de par la lourdeur et le coût des caméras traditionnelles,
  • de permettre à certaines scènes de foules (procès, etc.) d‘être tournées en continu en incluant des appareils HDSLR, dissimulés dans la foule, ce qui favorise la mise en scène et le jeu des acteurs,
  • de manière générale, de bénéficier de la légèreté des équipements.

On l’aura compris notre propos est de donner un aspect “news” à ce téléfilm de fiction historique ! … Une grande aventure commence donc!


Photo extraite d’une vidéo test réalisée avec un 5D MkII pour analyser les rendus résultants de l‘éclairage unique d’une bougie. (c) Sébastien Devaud

 

 

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5 commentaires “Tourner en vidéo HD avec les reflex Canon

  1. est-ce que l’ouvrage traite des différentes possibilités logicielles pour le montage ? je peine à trouver des informations sur la compatibilité du format vidéo avec certains logiciels, et le choix du format à adopter sur certains (du coup j’utilise imovie qui gère tout seul comme un grand :))

  2. Si l’auteur mentionne les workflows Avid, Premiere Pro, iMovie, Vegas 9 et Final Cut Express dans la partie « montage » de son chapitre 9, il met l’accent sur la suite logicielle Final Cut Pro Studio. Il s’en explique dans le livre :

    « Pour éviter une mauvaise interprétation sur le choix arbitraire du workflow recommandé, il serait préférable que je mentionne une partie de mon passé. Cinq années de ma vie ont été dédiées à la profession de monteur (de 1994 à 1999). Après avoir reçu une formation sur un système trois machines Beta SP, j’ai vu naître le montage virtuel et je l’ai adopté immédiatement. Les systèmes de montage Avid sur lesquels j’ai le plus monté professionnellement, le MEDIA 100 ou Première (Adobe), ont tous été en ma possession sur une longue période, pourtant ma préférence va aujourd’hui à la suite complète Final Cut Pro (FCP) Studio 2 (Apple). Étant amoureux de la firme Apple depuis sa création, la chaîne idéale de postproduction workflow que j’ai choisie de vous présenter est composée spécifiquement d’équipements professionnels de la marque (hardware et software). La suite Final Cut Pro Studio comparée aux performances des autres stations de montage s’est révélée la plus efficace pour la gestion des rushs des boîtiers EOS et apparaît comme la référence sur tous les forums. Ce workflow prend en compte les temps de conversions et divers calculs, et n’a qu’une seule vocation : optimiser les vitesses d’exécution des process image et garantir un rendu de la meilleure qualité possible. »

    Pour info, voici le sommaire du chapitre 9 :

    Chap 9 – Montage et conformation
    I. Quel workflow pour le montage ?
    1. Une solution idéale : FCP Studio en cinq étapes
    a/ Étape 1 : La conversion systématique
    L’EOS Movie Plugin-E1, plug-in incontournable pour FCP
    Le cas particulier du 720p
    Les cadences 50 et 60 i/s en 720p et le ralenti
    b/ Étape 2 : importation et identification des rushs
    c/ Étape 3 : création d’une séquence et synchronisation des rushs
    d/ Étape 4 : le montage traditionnel
    e/ Étape 5 : une sortie non compressée privilégiée
    2. Les autres alternatives
    a/ Les solutions économiques
    b/ Le workflow Avid s’est fait attendre
    II. La conformation
    1. Le mixage audio
    a/ Postsynchro, voix off, création de BOF
    b/ Le nettoyage et le mixage
    2. Image process : workflow idéal et rendus ultimes
    a/ Correction des rushs EOS
    b/ Étalonnage du montage des rushs EOS
    c/ Les effets spéciaux
    d/ Conversions pour la diffusion

    Mais la question des formats des vidéos (enregistrement, conversion, diffusion) revient de nombreuses fois au fil de l’ouvrage.

  3. Excellent article, avec enfin le point de vue des professionnels qui éclaircit beaucoup de point obscurs pour ceux qui, comme moi, ne font pas de vidéo. Et je me précipiterai en librairie à la sortie du livre.

  4. Excellente nouvelle que la sortie en librairie de ce livre dédié à la vidéo des réflexes Canon. Equipée d’un Canon 500D et d’un 7D, j’apprécie chaque mois de pouvoir filmer en Full HD avec ces 2 appareils et de pouvoir faire de timides montages amateur grâce à iMovie (en tant qu’utilisateur Apple). Le récit de mes voyages sur mes blogs y gagne en qualité, sauf que… j’ai bien besoin de conseils pro sur l’art de filmer et sur l’art du montage. Rien qu’en lisant les commentaires ci-dessus cela me confirme la nécessité d’acquérir Final Cut…

    J’attends donc le livre avec impatience, et notamment pour apprendre à filmer un paysage en travelling en conservant une ligne d’horizon stable ! 😉

    J’espère donc que le livre aborde également un chapitre sur le matériel complémentaire à utiliser pour filmer avec les réflexes Canon.

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