Noir et blanc : créer une ambiance
Publié le 2 mai 2011 dans Actualités Livres par Savine Dosda
Le tirage de cette dernière photo a été réalisé dans la même optique que celui de la précédente : aller dans le sens du sujet. Je n’ai pas cherché à faire apparaître trop de détails dans les ombres. Je n’ai pas non plus contrasté la photo pour mieux distinguer un sujet rendu plutôt mélancolique par la nature de la lumière et par le manque de piqué de l’objectif. J’ai donc tiré cette photographie de manière douce et dense. On est loin de l’ambiance lumineuse et fraîche de la deuxième image. Le tirage suggère davantage une scène hors du temps, un univers clos, un peu comme celui d’un souvenir ou d’un voyage intérieur.
Je vois de nombreux photographes débutants travailler leurs gris surtout après la prise de vue. Bien souvent, ils restent assez perplexes quant à la direction à donner à leur retouche noir et blanc. Faut-il ajouter ou retirer du contraste à mon image ? Jusqu’où dois-je densifier le ciel pour faire ressortir les nuages ? Face à un manque de repères et de réel projet, certains suivent la tendance du moment : noir et blanc très contrasté, ciels densifiés à outrance, etc. Pour éviter d‘être ainsi perdu face à la latitude d’interprétation offerte au post-traitement, alors que l‘émotion ressentie lors de la prise de vue s’est depuis longtemps évanouie, je pense qu’il est préférable de battre le fer pendant qu’il est chaud.
Aidez-vous de toutes les étapes développées précédemment pour trouver le bon point de vue, la bonne lumière et les bons réglages, ceux qui apporteront à votre prise de vue la tonalité de gris dont elle a besoin. Plus vous commencez tôt à agir dans le sens de votre projet photographique, plus il vous sera facile de doser votre post-traitement, et plus vous serez assuré d’atteindre votre objectif.
Dynamiser la composition
Dans le monde du noir et blanc, la photographie est délivrée d’une partie de ses obligations de fidélité par rapport à son modèle. Voilà un point de départ qui ouvre au photographe la voie de la liberté et de l’esthétique personnelle. Cela passe par le langage photographique, les spécificités du noir et blanc et, comme nous allons le voir ici, par la composition. Je ne vous répéterai pas la fameuse règle des tiers, valable pour le format 24 × 36, ou celle qui recommande de ne pas centrer le sujet. Il suffit en effet d’ouvrir quelques livres de photographie pour découvrir de nombreuses images réussies signées de photographes célèbres et dont la composition déroge complètement à ces règles. Plus important qu’une règle de composition, ce qui doit déterminer la manière dont vous occupez l’espace de votre cadre, c’est votre propre sens de l‘équilibre.
Je conseille souvent à mes stagiaires de prendre comme signe de la « bonne » composition le moment où, dans le viseur, ils se sentent intérieurement en accord avec elle. C’est essentiellement une question d‘équilibre : essayez de vous imaginer que chaque élément de votre photo (le sujet, l’arrière-plan, les lignes, les espaces vides, etc.) a un poids visuel et que vous devez l’harmoniser avec les autres. Regardez votre sujet dans le viseur et déplacez-vous jusqu‘à ce que l‘équilibre vous semble obtenu.
Cet équilibre ne s’atteint pas seulement avec un ensemble de lignes horizontales ou verticales, tout comme il n’implique pas non plus toujours l’immobilisme. Osez, par exemple, les compositions dynamiques en intégrant des lignes obliques dans votre cadre ; cultivez une instabilité savamment orchestrée en donnant volontairement beaucoup plus d’importance à une masse qu‘à une autre. Ci-après quelques exemples de photos où le dynamisme a été renforcé par l’utilisation de lignes obliques ou de déséquilibres.