Calibrer un écran ? Normes ISO et autres préconisations
Publié le 15 septembre 2008 dans Articles et dossiers par Jean Delmas

Contrôler l’environnement du poste de travail
L’ISO demande que l’image sur papier que l’on cherche à comparer à sa version affichée sur l‘écran soit éclairée par un illuminant de couleur D50/5000 K.
D’autre part, elle préconise que l‘éclairage ambiant ait une intensité suffisamment faible pour que la luminance d’un réflecteur parfait placé devant l‘écran (éteint !) ne dépasse pas le quart (ou mieux le huitième) de la luminance maximale de l‘écran, c’est-à-dire la luminance du blanc. Quant au rayonnement provenant de l’entourage immédiat de l‘écran, c’est le dixième de la luminance du blanc qu’il ne doit pas excéder. Les températures proximales de l‘éclairage ambiant et de l‘éclairage du papier doivent en outre être proches (+/- 200 K).
Enfin, les surfaces de couleurs vives sont prohibées aux environs de l‘écran. Cette règle concerne entre autres les vêtements portés par l’opérateur…
Il est logique que l’ISO préconise d‘éclairer l’image imprimée avec un illuminant D50. Tel est en effet l‘éclairage standard du monde de l’imprimerie, et c’est l’illuminant d’observation qui est prévu par les profils ICC d’imprimantes. Quelques logiciels professionnels de calibrage d’imprimante, comme Profile Maker 5, permettent bien de produire des profils de sortie basés sur un illuminant d’observation différent de D50, mais cette option n’est que rarement mise en œuvre.
Le choix d’un éclairage D50 est une bonne nouvelle pour les photographes professionnels et amateurs, car les dispositifs d‘éclairage dispensant une lumière de couleur proche de 5000 K sont assez faciles à dénicher et certains, comme les lampes Solux (50 W, 4700 K, indice de reproduction des couleurs 99 %), sont de bonne qualité et peu coûteuses. En revanche, les sources d‘éclairage artificiel de couleur D65 /6500 K, préconisées auparavant par la norme ISO 3664 éditée en 2000 pour définir les conditions d’observation d’une photographie, sont bien plus chères et sophistiquées.
Lampe Solux 4700 K (Christophe Métairie).
Pour le niveau d‘éclairage régnant autour du poste de travail, l’ISO se montre moins exigeante que dans la norme ISO 3664 qui préconisait un éclairement inférieur à 32 lx, ce qui marquait un retour en force de la chambre noire… Rappelons en effet qu’une simple lampe à incandescence de 100 W suspendue au plafond fournit un niveau d‘éclairement de l’ordre de 300 lx au niveau d’une table, et que l‘éclairement d’un espace de bureau banal dépasse 700 lx sur les plans de travail. Quant à la différence maximale de +/- 200 K demandée par l’ISO pour l‘éclairage ambiant et l‘éclairage du papier, elle reste une condition assez difficile à respecter, sauf à utiliser la même source d‘éclairage pour les deux fonctions.
Mesure de la lumière ambiante au niveau de l‘écran avec un colorimètre Eye-One Display2 muni de son diffuseur translucide.
Les niveaux d‘éclairement préconisés par l’ISO pour l‘éclairage ambiant sont désormais fixés par rapport à la luminance du blanc. Plus cette luminance est faible, plus le niveau d‘éclairement environnant doit être bas. Ainsi la luminance des objets entourant l‘écran est très inférieure à celle de l‘écran, disposition pertinente qui vise deux objectifs :
- éviter que les reflets induits par un environnement trop éclairé ne réduisent le contraste de l’affichage ;
- faire en sorte que l’observateur soit “chromatiquement adapté” à l‘écran, c’est-à-dire qu’il interprète bien comme étant “blanche” la couleur du blanc affiché par l‘écran. Si le niveau d‘éclairement de l’environnement immédiat de l‘écran est tel que sa luminance dépasse le maximum autorisé par l’ISO (le dixième de la luminance du blanc), surtout si la luminance du blanc est réglée sur une valeur faible, par exemple 80 cd/m2, alors l’adaptation de l’observateur à l‘écran peut être décalée vers l’illuminant d‘éclairage environnant. L’observateur, qui perçoit alors la couleur de l’illuminant comme blanche, trouvera que le blanc affiché par l‘écran est coloré. Si on est placé dans cette situation de faible luminance de l‘écran et de fort niveau d‘éclairement environnant, alors, il faut employer un éclairage d’ambiance dont la température proximale de couleur est aussi proche que possible de celle du blanc de l‘écran.
Conclusion
En résumé, voici comment un photographe peut, à mon avis, décliner le dogme ISO du calibrage d‘écran sans mettre en péril son acuité visuelle ni dilapider sa fortune :
- instrument/logiciel de calibrage : acquérir un système qui, outre ses fonctions classiques de calibrage, soit capable de mesurer un éclairement.
- luminance du blanc : 90-100 cd/m2
- luminance blanc/noir : > 100/1
- point blanc (LCD) : “natif” ou, éventuellement, D55/5500 K pour un écran haut de gamme, s’il en est capable.
- gamma : 2,2
- illuminant papier : proche de D50/5000 K (lampe Solux 4700 K…)
- environnement écran : éclairage ambiant “ modéré “ (< 64 lx mesuré sur l‘écran éteint) et de couleur stable, si possible proche de D50/5000 K. Eviter la proximité des fenêtres, les chambres d’hôtel ouvrant sur une enseigne au néon, les murs peints en vert, les vêtements de pourpre cardinalice. Les habits gris du bas clergé sont en revanche bien adaptés.